Présentation du deuxième Forum Industriel pour l’IA

Le Forum s’est déroulé dans les locaux de L’université Paris Descartes au centre universitaire des Saints Pères le 27 avril 2017 de 8h30 à 17h30

A la suite du forum de 2016, il est apparu que la problématique de la Gestion des Connaissances était essentielle à supporter toute intelligence artificielle et de toute façon pouvait participer d’ores et déjà au déploiement d’applications d’intérêt. Il a donc été décidé d’orienter le Forum Industrielle pour l’Intelligence Artificielle 2017 autour de cette problématique en organisant des ateliers thématiques. Chaque atelier a été animé par une personne issue de la communauté académique et une issue du monde industriel afin de permettre l’échange le plus fructueux possible.

 

Les thèmes développés, après une synthèse générale, ont été les Agents Conversationnels, la Gestion de la Connaissance et la Prise de Décision et la Confiance et la Transparence dans les Connaissances. Comme lors du précédent forum, une session a été dédiée à une présentation rapide de jeunes pousses et un nouveau type de session a été introduit afin de présenter des initiatives publiques ou privées permettant de financer à des fins applicatives des partenaires de l’écosystème de l’AFIA.

Pour les trois thèmes liés à la gestion de la connaissance, le format a été un exposé de différentes présentations suivies d’une mini table ronde. Cette façon de faire a eu pour objectif d’amener à des éléments de feuille de route ainsi qu’à permettre une discussion même limitée entre les deux communautés académique et industrielle.

Présentation du forum

Le forum a été préparé conjointement par :

00-FIIA17-01-PresentationAFIA : Une introduction au forum a été faite par le président de l’AFIA, M.Demazeau afin de mettre en perspective l’histoire de l’IA et l’action de l’association.

Thématiques du forum

Quand cela a été possible, un résumé a été fourni ou bien une synthèse.

Synthèse

Cette présentation a été réalisée par M.Jean Charlet (AP-HP, Paris, France & INSERM U1142/LIMICS, Paris, France).

La gestion des connaissances est un acte managérial qui définit pour son domaine de responsabilité ce qui doit être conservé, comment et sous quelle format cette conservation est organisée de façon à ce que puisse être transmis à un acteur futur un savoir, un savoir-faire avec la justification de la confiance accordée à cette connaissance.
L’ingénierie des connaissances (IC) relève de l’IA symbolique. Construite à partir d’un projet, elle n’est pas objective. C’est par sa représentation qu’elle devient accessible. Par la construction de modèles, des systèmes à base de connaissance, des interactions en l’humain et la machine, l’IC restitue avec un comportement mécaniste cette connaissance qui fait sens pour l’utilisateur.
L’ontologie correspond à un modèle de connaissance sur le monde décrit dans un langage informatique muni d’une sémantique formelle et interprétable par un ordinateur.

L’annotation sémantique des textes fondée sur des terminologies ou des ontologies enrichit la compréhension d’un domaine, améliore sa qualité intrinsèque et donne de l’efficience dans l’exploitation des contenus. L’exploitation de données de toutes sortes caractérisées par leur nature, leur provenance, la fiabilité de la source, le contexte de la captation des données est d’autant plus performante que l’on maîtrise les modèles associés et que l’on bénéficie d’annotation sémantique issues d’une IA symbolique. Cela n’interdit pas, bien au contraire, d’appliquer sur ces données, les algorithmes du « deep learning » qui ressortissent à l’IA numérique.

La déclinaison dans le domaine de la santé éclaire les différents points de cette observation.

Cette présentation faite par M.Nicolas Dubuc (Michelin, Ladoux, France) et M.Alain Berger (Ardans, Paris-Saclay, France)

Pour un industriel tel que Michelin, la mission d’une équipe « Knowledge & Technology Intelligence » est claire : « Leverage the internal and external skills and knowledge to face our R&D objectives. ». La question des connaissances se porte en interne comme en externe sur la maîtrise du savoir et de l’état de l’art dans son domaine, comme sur le regard de la vision stratégique de l’innovation dans le métier.

Quand on s’interroge sur la connaissance, on se pose la question de sa nature, de sa provenance, de sa localisation, de sa pertinence, de sa vulnérabilité, de son exploitation, de sa protection : la question de sa bonne transmission est centrale. La qualité d’un bon transfert de connaissance se traduit par une bonne réutilisation, une transposition pertinente, un enrichissement régulier. A ce stade, quand une expertise s’enrichit, est formalisée, maîtrisée et bien exploitée par les équipes, le terme de capitalisation est parfaitement approprié.

La dimension humaine est un sujet clé. Elle débute par la détection des connaissances critiques pour cibler l’action via des cartographies. Elle prend une dimension essentielle lorsqu’il s’agit d’extraire le savoir sur le domaine pour le restituer dans une « mise à disposition » intuitive via une modélisation bien dimensionnée. Quand on confie le patrimoine de connaissance validé, il conviendra de respecter sa confidentialité et d’en assurer son actualisation pour éviter toute obsolescence ou perte de savoir.

L’approche cognitiviste de l’ingénierie de la connaissance se caractérise par une représentation et une computation. Mais l’ingénierie de la connaissance se décline aussi comme un sujet technique (structuration efficace pour l’expert comme l’utilisateur) et un sujet stratégique. Il faut rendre explicites les savoirs tacites & capitaliser les expériences singulières. Quand on parle de capitaliser les connaissances, c’est avoir la volonté d’agir  pour les préserver, les exploiter, les faire interopérer avec d’autres systèmes et les enrichir pour les amplifier dans le temps.
Le métier de l’ingénieur de la connaissance, l’activité d’analyse de la criticité des connaissances, la production de recueil d’expertise (e-K.book livre de connaissance électronique) et un Rex sur les facteurs clés de succès ont été présentés avec des résultats obtenus chez Michelin.

Agents conversationnels et Ingénierie des connaissances

  1. 02-FIIA17-00-AgentsConversationnels-Viseo : la société Viséo par l’intermédiaire de Mme Frédérique Segond a introduit la notion d’agent conversationnel ainsi que la façon de procéder pour le constituer du point de vue de l’entreprise.
  2. 02-FIIA17-01-TechnologiesDuLangage-Orange : La société Orange (M.Henri Sanson) a présenté la difficulté de la compréhension du langage naturel et le défi posé pour la mise en place d’agents conversationnels efficaces.
  3. 02-FIIA17-02-AgentsConversationnelsEtIngenierieConnaissance-LIMSI : M.Nicolas Sabouret du LIMSI a introduit la nécessité d’une compréhension sémantique des éléments de langage de la personne en interaction et les défis à relever (par exemple la dissonance existant entre le niveau verbal et non verbal).

Il est à noter que le champ des agents conversationnels explose et qu’il ne demande pas forcément la mise en place d’interface en langage naturel.

Prise de décision et gestion de connaissance

Bruno Patin de la société Dassault Aviation a animé cette session en en présentant les acteurs ainsi que quelques points discutés par la suite. La présentation 03-FIIA17-00-PresentationSessionDecisionetConnaissance-DassaultAviation résume les différents points ainsi abordés.

  1. 03-FIIA17-01-DecisionEnSituationExtremeEtConscienceDeLaSituation-FNGE : M.Jean-Fabrice Lebraty de l’Université de Lyon 3 a présenté le point de vue académique sur la Décision en situation extrême et connaissance de la situation. En Résumé : La décision dans les environnements extrêmes constitue un thème  d’actualité. En effet, un contexte marqué par l’imprévisibilité et pour lequel la concurrence pousse à réduire les marges de manœuvre, impose aux décideurs d’adapter leurs mode de raisonnement et leurs outils. L’expertise et la gestion des connaissances deviennent alors des éléments clés pour décider. Il se pose alors la question des méthodes et outils qui permettent d’épauler des décideurs moins expérimentés. En nous appuyant sur des exemples, notamment issus du secteur aéronautique, nous montrerons que seule une synergie multi-niveau  entre l’organisation, l’équipe, l’individu et des systèmes décisionnels adaptés permettent de décider. Pour ce faire, nous nous fonderons sur les approches théoriques issues du courant de la « Naturalistic Decision Making (G. Klein) », les travaux de K. Weick en terme de création de sens, ceux de J. Girin pour bien comprendre les situations managériales, et aussi ceux de C.  Godé pour la notion de coordination. Cette présentation montrera aussi que les notions d’optimisation ne s’applique pas à de tels type de décision, ce qui peut conduire à des paradoxes managériaux délicats à gérer.
  2. 03-FIIA17-05-BusinessRulesAndProbabilisticModel-IBM : M.Philippe Bonnard de la société IBM a présenté une Utilisation de modèles bayésiens pour la prise de décision à base de règles métiers. En Résumé : Les systèmes à base de règles métiers (BRMS) tel que ODM développé par IBM, sont utilisés dans de nombreux domaines (banque, assurance, transport, médical… ) pour représenter et déployer la logique de prise de décision de l’entreprise. Ils mettent à disposition de l’utilisateur final des outils puissants et agiles de déclaration de la décision. Cependant, ces systèmes sont souvent peu adaptés aux traitements de données incertaines, manquantes ou erronées. L’étude URBS réalisée par le LAB IBM France en collaboration avec le laboratoire UPMC-LIP6 a pour objectif de compléter le système de règles ODM par des modèles probabilistes (réseaux Bayésiens, OOPRM) en étendant son modèle objet de données, son compilateur de règles, et son contexte d’exécution par un couplage faible avec le moteur probabiliste aGrUM. La présentation explique aussi comment la mise à jour des modèles probabilistes a été modifiée pour satisfaire les besoins de l’algorithme de pattern matching de type Rete du moteur de règle.
  3. 03-FIIA17-02-ConesDeConnaissance-KM2 : M.Laurent Gouzenes de la société Pacte Novation a présenté une approche de la gestion des connaissances dont l’objet était de réconcilier des niveaux de représentation différent et qu’il a nommé « Les cônes de connaissance ». En résumé : Une expérimentation récente utilisant le logiciel Watson a consisté à lui faire ingurgiter une bibliothèque importante de biologie. A la question « How do birds drink seawater », Watson peut alors répondre d’une façon qui semble savante ‘savante’ au premier ordre, mais qui en final ne correspond en rien à une réponse qu’un expert apporterait (en premier lieu une série de questions visant à préciser une question mal posée). Les experts sont capables de manipuler des hiérarchies de discours et raisonnements, et de faire appel à des domaines et modélisations différents pour aboutir à leurs conclusions et expliciter leurs raisonnements. Nous proposons la représentation en cônes de connaissance pour expliciter ces hiérarchies et délimiter plus précisément les compétences des systèmes.
  4. 03-FIIA17-03-DecisionDansLeVehiculeIntelligent-Renault : M.Jean-Marc David de la société Renault a fait un point de la décision dans les véhicules intelligents. Ceux-ci sont en train de révolutionner le champ de la mobilité individuelle et l’introduction de l’apprentissage décuple cette révolution.
  5. 03-FIIA17-04-DecisionEtGestionDeLaConnaissance-DassaultAviation : MM.Arnaud Branthomme et Pascal Thurig de la société Dassault Aviation ont présenté et défini ainsi le point de vue de l’entreprise quand à La gestion de connaissance dans le contexte de la décision embarquée. En Résumé : Dassault Aviation travaille depuis plusieurs années sur la capacité de planifier et re-planifier des actions qui concerneront le dispositif aérien. Si du point de vue de la création d’un plan des technologies arrivent à maturité, la contrepartie qui consiste à définir le problème à résoudre à partir des observations (d’abord de l’environnement qui comprend des machines pilotées ou non pilotées, des systèmes de défense sol, mais aussi les systèmes artificiels concernés ainsi que les états cognitifs des humains participant à la décision) lui introduit une problématique de la connaissance a représenter surtout dans la mesure où la décision à prendre ne sera plus le calcul d’un plan mais une négociation entre des systèmes artificiels et des humains (pilotes ou opérateurs). La présentation exposera d’abord ce que l’on appelle aujourd’hui une décision qui reste pour l’instant principalement le calcul d’un plan développé sur chacune des machines, puis elle exposera le futur de cette décision et les éléments complémentaires qu’on y introduira et enfin on exposera ce que Dassault Aviation pense être le niveau de la connaissance à manipuler par les systèmes artificiels.

Transparence, confiance et Ingénierie des connaissances

  1. Les orateurs de cette session ont été M. Jean-Gabriel Ganascia de l’UPMC qui est le président du comité d’éthique du CNRS a présenté un point de la situation ou plutôt un point des questions qui se posent dans l’utilisation des technologies de l’Intelligence Artificielle. Sont-elles au service des personnes ou au service des grandes sociétés du numériques qui souhaitent utiliser les personnes et ce qu’elles produisent comme information à leur profit ? Ne posent-elles pas un grand danger vis-à-vis de leur emploi par des états plus ou moins autoritaires ? M.Ganascia a évoqué des concepts comme « la confiance ne vient pas sans la transparence  » ou bien « les processus d’apprentissage pourront être limités par construction dans l’utilisation des données » ou encore « le principe de l’oubli » et d’autres encore. La thématique de la confiance est en train d’entrer dans le débat public et plusieurs institutionnels comme la CNIL sont en train de travailler à des documents permettant de positionner le problème.
  2. La CNIL par l’intermédiaire de M.Victor Demiaux a détaillé l’initiative en cours lié à la présentation précédente.
  3. 03-01 FIIA2017-0427 JP Cotton Ardans Transparence Confiance & IC : Le troisième intervenant fut M.Jean-Pierre Cotton de la société ARDANS qui présente le problème de confiance comme lié à la transparence de la méthode de validation des connaissances tout au long de leur cycle de vie. Voici un Résumé plus complet de cette intervention : La mise en œuvre industrielle de l’ingénierie des connaissances se heurte immédiatement à une réalité : le pragmatisme. Quand un client fait état de ce que chacun nomme connaissance, il considère pour sa part différentes dimensions qui lorsqu’elles sont alignées confèrent à l’information le statut de connaissance. Ces dimensions qui valorisent l’information sont ; le contexte d’usage, la maturité du sujet, la confidentialité appliquée et la justification de la nature et de la qualité attestant de son contenu, c’est-à-dire, le sceau d’approbation de l’expert. Concrètement, lorsqu’il s’agit d’un recueil de connaissance provenant d’un expert humain, la fidélité entre la modélisation et son savoir se traduit par la validation de chacun des éléments de connaissance formalisés. Concernant la notion de contexte, il y a ce désir de vérifier la conformité avec le domaine d’applicabilité de cette connaissance. Aujourd’hui l’ingénieur de la connaissance sait proposer à l’expert une représentation cartographique de ce qu’il a implanté dans la plate-forme de gestion de la connaissance. La vision holistique ou ponctuelle se doit d’être aussi synthétique pour être appropriable et bien interprétable par l’humain. In fine, c’est lui qui certifie tant les contenus que les liens entre les concepts qui constituent le dispositif. La technologie traite aussi de volumineux référentiels de connaissances gérées en configuration. Lorsque l’on manipule des bases de plus de 100 000 connaissances, l’organisation du patrimoine doit être facilitée pour l’utilisateur afin qu’il soit parfaitement concentré sur son activité métier : vers une ergonomie cognitive ou pour le moins une ergonomie contextuelle.  D’autres dispositifs sont porteurs d’une connaissance moins sensible mais qui se doit d’être déployée pour gagner en efficience collective. Si la diffusion et la collaboration imposent une interaction conviviale, le processus de validation du contenu et sa modération enrichissent la confiance des usagers dans l’application. Savoir qui a approuvé un contenu est un atout dans la crédibilité du message transmis et une sérénité quant à son exploitation immédiate. Enfin, une dernière illustration industrielle de l’exploitation de connaissance a été présentée au travers d’un dialogue entre une base de connaissance experte sur un domaine qui délivrait la juste connaissance à un outil de conception assistée par ordinateur afin de ne pas laisser de trace d’une expertise singulière dans un autre logiciel.Les plates-formes d’ingénierie des connaissances offrent aujourd’hui des éléments de clarté pour gérer avec pertinence et efficience leurs connaissances les plus sensibles.
  4. Enfin, le quatrième intervenant fut M.Patrick Constant de la société Qwant-Pertimm qui a présenté la politique de gestion des données personnelles dans le moteur de recherche éponyme.

Les projets IA s’annoncent

Cette session a été consacrée à la présentation d’initiatives privées en cours de lancement ou en exécution. Cela a commencé par une intervention par vidéo-conférence de la Corée de M.Pascal Ollivier de la société SOGET qui lance un appel d’offre pour répondre à des problématiques de logistiques dans les environnements portuaires. Mme Fabienne Reveillac de la SNCF a présenté l’initiative Tech4Rail (voir 05-FIIA17-00-Tech4Rail-SNCF) qui est en cours et permet à de jeunes entreprises de répondre à des problèmes posés dans le domaine du ferroviaire.

Les sociétés spécialistes ou utilisatrices de l’IA présentent …

L’objectif de cette session a été de présenter des jeunes pousses à travers une communication très simple de 3 planches, sous la forme qui sommes nous, que faisons nous et que représente l’IA pour nous. la présentation 06-FIIA17-00-PresentationStartUp regroupe toutes les interventions et les sociétés ainsi mises en valeur étaient :

  • La société Bayesia qui édite un outil d’aide à la décision en présence d’incertitudes basé sur l’approche bayésienne.
  • La société Oncle Bacchus qui propose un gestionnaire intelligent de cave à vins utilisant l’ensemble des interactions du client pour améliorer l’offre et les services.
  • La société EnerGiency dont l’objectif est la gestion intelligente de l’énergie dans les chaînes de fabrication par la capture du plus grand ensemble possible des données de consommation et de l’apprentissage pour prévoir les pics de charge ou bien les sous charges le plus en amont possible.
  • La société Destygo cherche à travers des chatbots à créer le guichet personnel du voyageur.
  • La société Cogiflex qui propose un assistant d’apprentissage pour le soutien scolaire pour les adultes.
  • La société MeetSys dont le but est de capitaliser les savoir faire ainsi que la façon de raisonner dans les entreprises.
  • Enfin la société ARDANS a présenté ses compétences et produits dans le domaine de la gestion de la connaissance.

En guise de conclusion

Le forum 2017 s’est annoncé très riche de ses communications et de ses échanges. Cela amènera à la rédaction d’un bulletin dont le dossier reprendra les points forts de cette journée.

Il reste encore insuffisant dans les échanges entre les communautés mais nous espérons que cela s’améliorera encore lors de la prochaine édition.